de J. R. R. Tolkien
Installés confortablement dans le salon, je lis la moitié du premier
chapitre de “Bilbo le Hobbit” à mes deux fils (7 et 11 ans), la
lecture complète du livre prendra trois bonnes semaines. Cette première
journée est un combat, jamais je n’ai aussi bien compris cette terrible
pensée de Benjamin Malaussène (Au bonheur des ogres de Daniel
Pennac) :
Les enfants me menacent de me remplacer par la télé si je
flanche
Je donne donc mon maximum pour rendre le texte vivant.
Deuxième jour, il faut finir le chapitre, je me résigne donc à utiliser
mon adversaire LCD pour arriver à mes fins « Ok, vous aurez le droit à
la télé mais après la lecture, si je vous estime suffisamment attentifs
pendant le demi chapitre ». On est loin de l’enthousiasme que j’espérais
susciter et que j’avais obtenu lors de la lecture de Charlie et la
chocolaterie. Il faut dire que Tolkien détaille énormément les scènes,
le vocabulaire est parfois un peu riche pour un enfant de 7 ans,… Je
garde toutefois courage, il y a quelques années j’avais abandonné le
Seigneur des anneaux (lecture solitaire) après le premier tome, il
serait dommage de se laisser impressionner encore une fois par un tout
petit bonhomme aux pieds poilus.
Troisième jour, je m’arrête en milieu de chapitre comme la veille :
« ”Et voici ce qu’il vit.” La suite demain, on a lu un demi
chapitre ». La réaction ne se fait pas attendre et me rassure quelque
peu « La suite ! Il y a trop de suspens ! On finit le chapitre ! », cela
fait plaisir et la suite s’y prête bien puisqu’on y rencontre des trolls
dans une scène drôle et vivante. Je ne lâcherai rien, ma quête de
lecture semble moins insurmontable que prévue initialement. Pendant
plusieurs jours nous lirons d’ailleurs des chapitres complets plutôt que
des moitiés.
Au cinquième jour, on serre les fesses devant les gobelins, au sixième
la tension est insoutenable lorsque nous rencontrons Gollum : je lui
donne une voix personnalisée mais forcément un peu influencée par la
première trilogie (je n’ai pas vu la trilogie Bilbo). J’ai dû limiter
les intonations, les enfants étaient terrorisés. Nous faisons une pause,
la jambe du grand tremble, le petit commence à se lever pour partir !
J’étais concentré pour garder leur attention, certes, mais je ne
m’attendais pas à ce qu’ils vivent autant la scène. Cette nuit là, le
grand dormira avec la lumière, le petit la porte ouverte. On peut dire
qu’il ne fait maintenant aucun doute qu’ils vivent le récit.
Gandalf, les nains, Beorn, les Wargs, araignées, aigles, elfes, Smaug,
Barde,… aucun personnage n’aura laissé indifférent mes enfants et
durant plusieurs jours leurs dessins seront en rapport avec la quête de
Bilbo. Notre seul regret aura été la couverture particulièrement peu
attrayante (par rapport à celles de bien d’autres éditions), le dessin
d’Henri Galeron est décevant, ferait éventuellement l’affaire pour
illustrer un chapitre mais n’a rien à faire en couverture !

